[EDITO DU JOUR] Un Cadenas en attaché de presse !







Bamba n’en demandait pas autant. La publicité est payante d’ordinaire, mais ici, elle est gratuite et désormais le monde entier sait qu’à Dakar, un lieu de culte, l’une des plus belles mosquées au monde, un véritable joyau, va être inauguré le 27 septembre prochain. N’en déplaise à un élu mariné à la sauce Le Pen. Autant de bruits pour un lieu de culte financé par des fidèles d’une communauté religieuse, sur fonds propres.
D’aucuns se demandent si la sortie du délégué départemental de la Fédération du Rassemblement National de la Mayenne ne reflète pas, quelque part, une obsession pour l’islam, une stigmatisation du mouridisme voire un mépris à l'endroit de la communauté noire de France. A voir dans l’inauguration du complexe Massalikoul Djinane un « emblème contre l’Occident », les propos peuvent choquer, certes.
Mais ils sont à relativiser, à replacer dans le contexte d’une Afrique devenue trop dépendante de l’aide internationale, notamment de la France où nombre de citoyens estiment que leurs impôts servent, aussi, à tenir sous perfusion, des pays pauvres très endettés et surtout mal partis. Maladroit, Jean-Michel l’a été. Provocateur est le terme qui sied. Mais ses propos, pour un mouride d’un certain niveau intellectuel, devraient être perçus comme du baume au cœur. Puisque reconnaissant, implicitement, que malgré la pauvreté endémique collée à l’Afrique depuis des lustres, il existe, dans cette contrée du monde, une petite communauté religieuse indépendante, autonome et capable de prendre en charge, au moins, les préoccupations de ses membres, coûteraient-elles la bagatelle de 30 millions d’euros... Une communauté qui ne fait pas la manche dans les salons feutrés de l’Occident, mais qui croit au culte du travail et à la solidarité de ses composantes.
Pourtant, avec 12 milliards d'euros, soit 7 860 milliards de FCfa d’aide au développement reçue par l’Etat du Sénégal en 2018, le pays de la téranga continue d’exporter ses malades à l’étranger, au Maroc et en France notamment où les élites politiques s'exilent, à la recherche d'une santé meilleure, à défaut, y mourir en paix, faute de structures sanitaires adéquates ou spécialisées, à même de les prendre en charge convenablement dans leur propre pays.
« 30 millions d’euros qui n’iront pas aux pauvres Sénégalais », dit Jean-Michel. Qui ignore sans doute, que l’aide au développement, non plus, ne profite pas entièrement aux Sénégalais mais à ses élites, à des générations d’hommes politiques qui devraient être audités pour dire, en vérité, ce qu’ils ont fait depuis 70 ans, de l’aide au développement devenue ce qu’il convient d’appeler l’aide à la précarisation des anciennes colonies, laquelle les maintient dans une dépendance chronique vis-à-vis de l'Occident.

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